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3 septembre 2009 4 03 /09 /septembre /2009 17:48
on le sait, la fiabilité de nos souvenirs est souvent discutable.

Prenez l'exemple d'une scène vécue à plusieurs, racontée quelques temps après, chacun aura sa version.
Qui n'a pas fait l'expérience de faits racontés en famille, et contredits par l'un ou l'autre, conclus par cette remarque : "Mais enfin, je sais bien, j'y étais aussi..." ou " Ben ça alors, vous y étiez tous les deux et vous n'avez pas vu la même chose..."

D'une part, oui, on ne vit pas la même chose que les autres, mais aussi, au fil du temps, les sovenirs se recomposent, se refont, et perdent peu à peu la vérité qu'ils avaient par rapport à ce qu'il s'est réellement passé.

cela pose donc grandement question quand ces souvenirs sont importants, dans le cas de témoignage à des fins judiciaires par exemple.

globalement, les souvenirs dont nous sommes les gardiens sont donc, plus ou moins faux. moins parce qu'on en a gardé l'essentiel, mais plus parce qu'ils ne correspondent pas à ce qui s'est passé.

Une expérience simple, dite des questions inductives.
cela consiste à montrer quelques instants une photo ou un document à quelqu'un, et de lui poser ensuite des questions sur ce qu'il a vu. ces questions sont suffisament préparées pour comporter des détails qui se surajoutent comme éléments d'informations, mais ne faisant pas partie du document initial.
Par exemple, la dame avec le chien qui s'apprète à traverser, qu'a-t-elle dans la main? sauf que sur la photo, il y a bien une dame qui attend près du pasage piéton, mais il n'y a aucun chien.
plusieurs questions, des standards et des piégées, sont ainsi posées. globalement, peu importe les réponses.

La dernière phase seule retient l'attention. on demande une description de l'image qui a été présentée, et on obtient une description qui comportera des éléments n'étant pas sur la photo, mais induits par les questions posées. Les journalistes font souvent ça quand ils ont peu d'éléments sur un fait divers. Ils émettent supposition sur supposition, employent beaucoup le conditionnel, et tournent tout ça pour qu'au final, il se pourrait bien que, mais si, c'est bien lui le coupable...

Tout ça pour dire la fragilité des souvenirs que nous possédons, sans parler de l'activité inconsciente qui nous les modifie tant et plus, des souvenirs tronqués, des souvenirs écrans, des inventions, etc...

Un autre point à retenir, c'est la construction de notre identité qui aboutit à ce que nous sommes, addition infinie de toutes nos expériences, et de tous les souvenirs que nous en avons ( souvenirs qui etc, voir plus haut ). cette question est très vaste : qui sommes-nous, somme de ce que nous croyons avoir vécu laors que ça ne s'est pas du tout passé comme ça. Sur ce point, peu importe, car on y arrive. Même si les souvenirs ne sont pas exacts mais refaits, on parvient tout de même à "être quelqu'un", à se définir, à se construire une identité malgré cette non-vérité. Et même, pour être, on n'a pas vraiment besoin de la vérité historique des faits. On arrive à faire avec ce dont on se souvient.

actuellement, la technique moderne nous donne moyen de tracer avec une précision informatique certains évènements. les téléphones portables nous localisent, on sait où on est en temps et en heure, et où on était il y a x années, les blogs gardent traces de nous d'une façon indélébile ( car même si notre compte est supprimé, qu'est-ce qui nous assure que tout a été effacé sur le Net, que personne au monde ne garde une copie), et les appareils photo et caméscopes numériques génèrent du document visuel à la pelle. la production d'informations visuelles se mesurent à la croissance des vente des support, carte, disque dur, gravable, et on arrive à des millions de téra octets d'information produites. Ces informations, sauf destructions ou manipulation intentionelles, ne s'erronnent pas. Au fil du temps, ce souvenir là ne se modifie pas.

Alors, qu'en est-il de notre construction identitaire qu'on accomode toujours avec  ce dont on se souvient, qu'on bricole, qu'on raffistole, si quelque chose d'indiscutable vient nous montrer la vérité des évènements.
"- Mais si, il s'est passé ça...
- Mais regarde, tu vois sur la photo, c'est pas possible....
- Ben ça alors, mais j'ai toujours cru que..... et ça fait des années que je pensais que....."

qu'en sera-t-il de notre rapport au monde et à nous même quand la technique se souviendra de tout?
que pourrons-nous penser quand une vérite, autre que celle dont on se souvenait, qu'on gardait en mémoire, et avec laquelle on s'était construit, se fera jour?
qu'adviendra-t-il du temps où la machine se souviendra pour nous?
qu'en sera-t-il de notre liberté, de notre humanité dans la non-technicité de pouvoir se souvenir ou non de quelque chose?
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