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4 décembre 2009 5 04 /12 /décembre /2009 22:53

            La question du jour portera donc sur l’identité nationale, très à la mode en ces jours.

            Comme cela a déjà été mis en lumière il y a longtemps, on peut faire un lien entre le développement d’un individu et celui de l’humanité. Il y a des phases, des crises, des dépassements, des figures parentales, des naissances et des morts, des principes organisateurs. L’adolescence se voit souvent accolée au terme de « crise » (qui vient de décision, jugement, et aboutit souvent à une action suite à cette décision) car la personne vit quelque chose de suffisamment troublant pour être capable de trouver en elle les réponses à ses questions.  L’adolescence est le moment du passage à l’acte du corps, de la puberté, de l’annonce de la vie sexuelle à venir, du lâchage de l’enfance, de la découverte de l’autre, de la découverte de soi dans la nouveauté des rôles sociaux et des capacités intellectuelles pour penser cela. Les enjeux sont tellement divergents qu’aucune solution ne se trouve, à moins de renoncements terribles. C’est, quand on a quinze ans, un peu effrayant. Alors, le Moi, coordinateur du psychisme, va tenter de faire avec tout ça, ce qu’on s’est construit jusque là, ce qu’on aime, qui on croit être, notre parole qui est, peu à peu, prise en compte comme celle d’un grand, comme dans les responsabilités ou les choix.

            La construction de l’identité, ce sont ces choix et ces rejets, ce qu’on prend pour être «  pareil » ou qu’on jette pour ne pas y ressembler. Il y a des choix qui sont faits, même si beaucoup de choses sont déterminées par ce qui est déjà en place.

 

            Et cette identité, qu’en est-il quand elle se passe au niveau national ? Ne sommes-nous pas, en ce moment, en train de nous poser la question de qui nous sommes avec, parmi nous, une proportion certaine d’éléments que nous n’identifions pas comme étant notre ? Qu’en est-il de ce que nous acceptons et refusons ?

            Mais revenons un peu sur la question de l’identité. L’identité est un concept ambivalent, c'est-à-dire qu’il signifie plusieurs choses. L’identité, c’est à la fois ce qui fait que les choses sont pareilles, mais aussi qu’elles sont uniques, crise identitaire pour dire que je ne suis pas comme toi ou que je me questionne sur mon identité. Papier d’identité, pour dire que je suis moi, et pas un autre. De l’identité, on passe à l’identique, qui veut dire « pareil ». J’ai mon identité de français, régionaliste, citadin, habitant du quartier, jusque dans ma famille ou ma génération, car je suis comme ceux qui partagent ces critères avec moi, à la différence des autres. L’identité, il n’y en a qu’une, mais si on constate l’identité de deux choses, c'est-à-dire qu’elles sont identiques, alors, elles sont pareilles. Nous laisserons de coté pour le moment les différentes composantes de l'identité, ce qui complexifierait le débat.

 

Qu’est-ce à dire que d’incorporer en notre similitude, en notre identité, en du « pareil », d’autres si différents de nous ? Que signifie d’être musulman dans la patrie du vin rouge et du saucisson pur porc ? Qui s’identifie à l’autre ? Car l’identité va dans les deux sens : partagerons-nous nos sandwichs à l’ombre des moquées ? Célébrerons-nous l’Aïd el-Kebir comme le 14 juillet ? Et plus précisément, est-ce qu’Abdel peut se dire français ? Est-ce que Mustapha est un français ? Et puis-je intégrer dans ma définition, considérer au même titre que moi que je reconnais comme français, que Mohammed soit français ?

Psychologiquement, l’échec du maintien de l’identité, de l’union de l’individu psychique à ce stade de sa vie peut prendre de graves formes psychopathologiques, la plus connue étant la schizophrénie, qui veut dire « coupure ». Coupure de l’être en deux (ou plus), car échec du Moi à intégrer tout ça.

Et lorsqu’on voit la joie de la communauté algérienne à la victoire de son équipe, on peut se demander de ce qui s’est raté de cette intégration identitaire pour que ces français célèbrent la victoire d’un autre pays ? Et que se passe-t-il si la coupe du monde nous offre un France-Algérie ? Est-ce qu’il faudra faire jouer des voleurs ? Ça ne doit pas être facile de courir avec les mains coupées mais ça évitera les fautes…

 

La société a encore un travail à faire, travail de transformation de son identité, c'est-à-dire de qui elle est. Les autres ne seront pas incorporés, assimilés, dissous sans que la société n’en garde des changements. Ceux qui nous font nous poser la question de l’identité nationale font partie et changent la société qui les accueille, comme les découvertes de la vie adolescente modifient la personne en train de les vivre, comme on change quand on rencontre quelqu’un…

Comme quand on dit : «    - Mais tu as changé, toi, non ?

- Oui, je crois que j’ai rencontré quelqu’un... »

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